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Fanchon la vielleuse.
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3-3
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auroit d'abord eu le malheur d'être perfécutée par fon propre pere, qui demeure à l'entrée de la rue Saint-Médard, chez le premier marchand de vin à gauche, faifant auflï voir la lanterne magique ; que pour fe garantir d'un funefte événement elle auroit eu, en fécond lieu, auffi le malheur de précipiter fans diftinction le premier mariage qui s'eft préfenté en époufant ledit Ménard ; qu'elle s'eft cependant toujours appliquée au bien de leur ménage et a eu pour fon mari toutes les attentions poffibles fans qu'il puiffe lui faire aucun reproche ; qu'elle s'eft infenfiblement aperçue que ce mari avoit de mauvaifes inclinations et une mauvaife conduite, qu'il fe livroit à toutes fortes dc paf-fions ct notamment à celle du vin et à Ia diffipation du peu de bénéfices qu'il faifoit'journellemcnt et de celui d'elle comparante ; non content de ce, lorf-qu'il ne pouvoit pas fuffirc à fon extrême diffipation, il emportoit ct vendoit les meubles de leur ménage, et lorfqu'elle vouloit lui faire quelque repréfen-tation pour lui infpirer de la raifon et lui faire fentir i quel point il les réduifoit, il s'échauffoit et la maltraitoit cruellement fans aucune retenue, humanité, ni diftinction des endroits où il lui portoit de cruelles voies de fait, ce qui arrivoit prefque journellement ; de forte qu'elle s'eft trouvée obligée (après avoir mis tout en ufage inutilement pour faire changer fon mari de conduite) d'abandonner fon ménage, tant pour mettre fa vie cn fureté, que parce qu'elle n'y trouvoit aucun fecours et qu'elle ne pouvoit affouvir la confommation ct la diffipation de fon mari ; qu'elle s'eft retirée à Bruxelles pendant quatre mois et eft revenue depuis huit jpurs en cette ville, s'eft logée rue de Jouy, chez le fleur Dumont et fa femme, en attendant qu'elle puiffe prendre une chambre au terme dc Pâques ; que fon mari ayant appris qu'elle étoit dc retour, voudroit l'obliger de retourner chez lui dans une chambre, rue Mouffetard, au 3- étage, où il n'y a pour ainfi dire que les 4 murs, n'y ayant qu'un méchant lit et des effets d'aucune valeur : ce qu'il ne veut exiger que pour lui. diflïpcr dc nouveau le petit bénéfice qu'elle fait journellement dans fa profeffion ct qu'elle économife pour fe faire fubfiftcr honnêtement et tacher dc foulager le feul enfant qu'ils ont, dont elle veut bien fe charger pour lui procurer l'éducation convenable et le retirer des mains d'un père qui n'a ni entrailles, ni conduite, et dont l'exemple pourroit caufer un mauvais effet à l'éducation dc Ieur enfant ; qu'il eft elTentiel pour cela faire de remédier au défordre de la conduite dudit Ménard, foit en Ie captivant dans un lieu d'où il ne puiffe fortir ou en lui en impofant d'une manière qui puiffe, pour ainfi. dire, le métamorphofer de façons d'agir et dc penfer, s'il eft poffible ; qu'en tout cas, un pareil mari ne peut empêcher elle comparante (qui fe comporte d'une façon qu'il n'efl pas poffible de lui rien imputer à mal) d'être libre, de faire ufage de fa profeffion et de donner de l'éducation à leur enfant, ce qu'elle ne pourroit s'il n'étoit pas remédié à la conduite de fon mari par l'autorité du magiftrat. Auquel mari il eft facile, fans lui faire fubir le fort de la prifon, de le contraindre de fe retirer dans fon pays natal de Savoie où il a deffein de retourner et il voudroit emmener elle comparante pour être plus maître de l'obféder; mais, comme elle eft
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